Chayton O. Brooks

Je n'ai pas grandi dans l'outrecuidance luxure que certains de mes compatriotes ont pu avoir. Je ne parviendrais jamais à les jalouser. Peut-être qu'eux me jalousent ? Mais je crois le contraire. Jamais personne ne voudra d'une enfant qui a vécu jusque ses onze ans dans le plus sordide orphelinat que possède Londres en son sein.
D'après les dires de la mère supérieure, je serais née dans l'automne, où le temps s'avérait des plus frileux et des plus maussades. Un mot griffonné à la hâte aurait accompagné ma venue, datant de seulement quelques jours. Vu le nombre d'enfants et de nourrissons esseulés dans ce bâtiment des plus lugubres, je faillis ne pas avoir de logis, la mère supérieure étant débordée par autant de brebis miséricordieuses présentes en son sanctuaire.

Mais je suis restée. Peut-être ne valait-il mieux pas ?

J'ai donc grandi, à travers les rires d'enfants et les punitions malaisées. Nous étions plusieurs à faire le dos rond lorsque la mère supérieure faisait régner sa voix de stentor à travers le branlant édifice, mais lorsqu'elle avait le dos tourné ... C'était autre chose. Je n'étais pas la dernière à faire les plus sottes bêtises, ce qui me valait quelques remontrances et punitions corporelles bien senties. La mère supérieure était toujours elle aussi, sujette aux idées les plus cruelles à mon égard. Elle m'a toujours abhorrée me trouvant "étrange" par rapport aux autres enfants présents. En ce qui me concernait, je m'imaginais dans un autre monde, rêvant d'une vie qui n'était pas la mienne.

Du moins, pas ici entre ces quatre murs étouffants et poussiéreux.

Le jour de ma septième année, je sus que je n'étais pas de ce monde et ce que j'avais rêvé en secret était en train de se réaliser. J'avais réussi à faire virevolter quelques objets autour de moi, en riant gaiement. Mes "amies" rapportèrent ce fait illustre à la mère supérieure qui eut pour seule idée de m'enfermer dans une sombre pièce dépourvue de lumière pour m'apprendre à ne plus mentir et m'empêcher d'être si spéciale aux regards envieux des autres. Mes relations n'étant pas des plus cordiales avec les membres de la maisonnée, cela n'allait pas aller en s'arrangeant. Bien au contraire. Déjà détestée par la mère supérieure envers qui je n'avais nul respect, cette dernière m'ôta la dernière chose qui faisait de moi ce que je suis. Cette longue chevelure couleur auburn que je n'ai jamais voulu couper et ce depuis mes premières années.

J'en ai pleuré et ce toutes les larmes de mon corps. Et je détestais encore plus cette marâtre qui m'avait offert un toit juste pour assouvir ses désirs les plus sadiques en louant au Seigneur, une mielleuse prière. Je haïssais cette femme qui se faisait appeler "mère", mais qui n'en avait pas l'étoffe. Où étaient ces géniteurs ? Où étaient ceux qui m'avaient mise au monde pour me donner au plus violent des Enfers ? Etaient-ils morts ? Des questions qui ne trouvèrent jamais de réponses. Même si je m'évertuais, essoufflée et en larmes, à les demander. J'eus une réponse le jour de mon onzième anniversaire, assortie d'une lettre cachetée à mon nom provenant d'un lieu qui m'était totalement inconnu.

Une vieille femme était présente dans le hall de l'orphelinat, engoncée dans un manteau de fourrure et dont le visage fermé pouvait rivaliser aisément avec celui de la mère supérieure. Dans la même journée, j'appris que cette personne âgée, était mon aïeule. Ma grand-mère maternelle : May Brooks et qu'elle était à juste titre ma seule famille restante. Et que j'étais une sorcière. Ainsi donc, ce que j'avais rêvé étant petite, était en train de se réaliser ? Heureuse, j'appris aussi que j'allais être parmi les rangs de Poudlard, école émérite pour jeunes sorciers en devenir. Là était donc, l'énigme de cet étrange patronyme. Selon ma -nouvelle- grand-mère May, j'allais rejoindre juste les rangs des Serpentards qui n'avaient grâce qu'à ses yeux.

Wait ! What ?

Une ribambelle de questions étaient toujours sans nulles réponses. A savoir pourquoi ma grand-mère n'était-elle venue que maintenant me récupérer ? Et où étaient mes parents ? Jamais, elle ne m'octroya aucune réponse, préférant se murer dans un secret de famille que je trouvais sombre. Elle m'avait arraché d'un Enfer, pour me plonger dans un second. Un illustre Manoir familial aux lourdes tours qui allaient être ma geôle et mon tombeau et ce lorsque je serais en vacances. Cette bâtisse était à l'image de ma grand-mère : froide et austère. Et il n'y avait bien qu'un réconfort dans cette triste masure, Hannah la servante. Elle était ma confidente et mon amie. J'étais la seule à lui octroyer les égards dont elle avait l’opprobre. Mon aïeule, semblable à elle-même s'avérait froide en toutes circonstances, sauf lorsqu'une femme à la chevelure de flamme venait lui rendre visite. Or là encore, je ne sus pas mettre de nom sur ce visage. C'était secret défense.

Avec une rage sans nulle autre pareille, grand-mère May apprit que j'étais dans le rang des Poufsouffles, une des maisons qui lui donnaient la nausée. J'étais une honte, de ne pas avoir été répartie parmi son ancienne maison. Mais moi, j'étais plus qu'heureuse, consciente que ma particularité me prédestinait à cette maison et non pas aux autres. J'avais récupéré ma longue chevelure auburn qui n'était plus et ce depuis ma première année dans ce château aux milles merveilles. J'avais voulu marquer cette différence notable de mes années obscures à l'orphelinat par un camaïeu de couleurs toujours les plus extravagants sur ma longue chevelure. J'avais appris à me servir d'une baguette, chose qui était totalement nouvelle pour moi, croyant que j'étais à juste titre une "Moldue". Là aussi, j'avais du me plier à tout un vocabulaire établi.

A l'orphelinat, les bases m'avaient été inculquées en plus d'une éducation stérile et sans nulle saveur, agrémentée d'un zeste de punitions. Poudlard, c'était autre chose. Même s'il y régnait une discipline, elle n'était pas fer et je n'avais pas envie d'aller contre l'ordre référent. Or, je resterais toujours une tête brûlée avec mes cheveux de toutes les couleurs, mes vêtements colorés et mon désir illusoire d'être perdue dans le plus doux des rêves.
En parlant de rêve, et ce depuis que je suis capable d'écrire, je tiens un journal, y narrant mes pensées et mes désirs. Il est dans un état déplorable, réparé à plusieurs reprises avec du scotch, ce qui lui valut d'avoir été plusieurs fois mis à la poubelle et d'en être ressorti. Avec les honneurs.

J'aimerais écrire. C'est ce vers quoi mon cœur me porte. Griffonner des quantités de feuilles de papier ne me poserait nul problème. J'aimerais écrire pour la "Gazette du Sorcier". Et ce rêve, on ne parviendra pas à me le briser, parce que je suis Chayton Olympe Brooks, et soyez-en certains, vous ne serez pas prêts de m'oublier.